10 000 milliards de mots : voilà l’ordre de grandeur, brutal, qui résume l’ampleur du chantier derrière GPT-4. Oubliez la cartographie transparente ou la liste soignée des sources, il faut se contenter de fragments, d’indices, et d’une opacité savamment entretenue. OpenAI mentionne des corpus vastes, venus des quatre coins d’Internet, sans jamais lever le voile sur le détail. Manuels, encyclopédies, forums, articles savants, œuvres littéraires : le modèle puise dans une immense bibliothèque, mais la sélection exacte reste verrouillée.
Il existe tout de même des frontières. Certains éditeurs, plateformes ou auteurs ont clairement refusé que leurs contenus servent à l’entraînement des IA. À l’inverse, des accords de licence commencent à émerger, esquissant un nouveau paysage. Mais la question de la provenance des données continue de tendre les relations entre OpenAI et le monde de la création, de la recherche ou du journalisme.
Plan de l'article
Comprendre GPT-4 : évolution et fonctionnement de l’IA générative
GPT-4, figure de proue parmi les modèles de langage signés OpenAI, change la donne dans le champ de l’intelligence artificielle générative. Sa mécanique : une architecture « generative pre-trained », nourrie d’un volume ahurissant de textes et d’images. L’ambition est nette : embrasser une multitude de contextes, de tons et de pratiques pour fournir des réponses cohérentes, modulées, parfois déconcertantes tant elles peuvent se montrer nuancées. Révélé par Sam Altman, GPT-4 s’appuie sur des milliards de paramètres, une avancée technologique qui marque une étape décisive.
Ce modèle sort du lot grâce à l’arrivée de fonctionnalités multimodales, capables de digérer simultanément du texte comme des images. Avec l’appui de Microsoft, l’infrastructure de GPT-4 prend une tout autre dimension, multipliant la puissance du système. Les usages se sont éclatés : génération automatique de texte, aide à la rédaction, synthèse d’informations, analyse et création de code informatique… tout devient possible quasiment instantanément.
À l’intérieur, c’est un apprentissage statistique hors norme qui s’exprime. Chaque mot, chaque bout de phrase alimente un réseau neuronal tentaculaire, qui affûte ses prédictions, affine ses formulations, développe ses argumentaires. Derrière ces milliards de paramètres, c’est un outil de conversation qui se révèle : il anticipe, dose la nuance, s’adapte au ton ou au sujet demandé.
L’évolution fulgurante du modèle, largement couverte dans la presse spécialisée, ne laisse pas de côté une interrogation persistante : sur quels textes s’appuie précisément GPT-4 ? OpenAI choisit ici de rester muet et entretient le mystère autour de la vraie nature de ses bases de données. Transparence et pluralité ? Ce sont les angles morts du système, et ils focalisent toutes les passions.
D’où proviennent réellement les données utilisées par GPT-4 ?
La question des données utilisées par GPT-4 reste verrouillée, jalousement préservée par OpenAI. Aujourd’hui, l’entreprise pèse plusieurs milliards de dollars et revendique l’entraînement sur des corpus massifs issus du web, tout en évitant de dessiner clairement les contours exacts de ce trésor. Les communications officielles se contentent d’évoquer une collecte à très grande échelle.
Dans ce flou organisé, certaines grandes catégories sont toutefois mises en avant :
- pages publiques, livres numérisés, forums, bases de données ouvertes.
Des plateformes influentes participent sans doute à alimenter ces ensembles, mais OpenAI ne cite aucun nom. Nulle référence explicite à Google ou au New York Times ; la presse américaine, elle, n’hésite pas à mentionner des collectes massives sur ces géants du web.
Utiliser ces jeux de données soulève des sujets épineux : droit d’auteur, protection des données personnelles. Le New York Times s’est par exemple tourné vers la justice pour dénoncer la reproduction de ses articles. La matière qui nourrit ChatGPT fait donc l’objet d’un débat serré sur le respect des œuvres et leur exploitation par l’IA.
Face aux critiques, OpenAI insiste : seuls des contenus « librement accessibles » alimentent son modèle, même si des documents issus de « sources tierces » complètent la manne. L’organisation prétend écarter le plus possible les données privées ou sensibles, mais la frontière reste brouillée, et le filtrage échappe à toute vérification indépendante. Les partenaires tels que Microsoft offrent l’hébergement technique, sans intervenir sur la nature des corpus. Résultat ? Chercheurs et spécialistes du droit restent face à une porte à moitié close, et attendent toujours des éclaircissements solides.
Entre diversité et limites : quels types de contenus alimentent l’apprentissage ?
Cette diversité des données façonne autant la richesse du modèle que ses points faibles. Les volumes brassés sont gigantesques, l’univers du texte sert de socle, et l’ensemble s’ordonne autour de différentes familles de contenus.
Pour se figurer la réalité des sources, voici les grands types repérés :
- articles, essais, manuels, discussions publiques, pages de documentation.
La collecte va de passages issus de livres passés dans le domaine public aux contributions techniques relevées sur des forums spécialisés. Cette variété pèse, mais elle ne gomme pas les déséquilibres et limites.
- Contenus encyclopédiques : des ressources libres d’accès, telles que Wikipedia, fournissent la base factuelle nécessaire aux textes générés.
- Code informatique : des dépôts publics, comme ceux hébergés sur GitHub, se retrouvent dans la boucle d’entraînement et servent à muscler la génération de code.
- Discussions en ligne : échanges sur des forums, sites de questions-réponses ou plateformes du style Stack Overflow, apportent nuance linguistique et adaptation contextuelle.
Avoir une telle pluralité de sources aide GPT-4 à fournir des réponses nuancées, mais ce choix emporte aussi son lot de biais : la crédibilité, la diversité des opinions ou l’actualité des informations fluctuent d’un corpus à l’autre. OpenAI insiste régulièrement sur l’écartement des données personnelles lors de la phase d’apprentissage, mais l’étanchéité est imparfaite : des bribes de conversations ou d’identifiants peuvent réussir à franchir les mailles du filet.
C’est donc la composition de ce tissu de données qui conditionne la pertinence des réponses de ChatGPT. Une base large et disparate promet une certaine agilité, mais la multiplication des extraits non sourcés ou non vérifiés peut renforcer erreurs, lacunes ou stéréotypes.
GPT-4 aujourd’hui : usages concrets et questions d’actualité
La génération de texte signée GPT-4 infiltre désormais tous les secteurs : entreprises, écoles, médias, santé, administrations. Plus de cent millions d’utilisateurs y auraient déjà recours, selon OpenAI. En France, ChatGPT s’invite dans les pratiques professionnelles et universitaires, et fait émerger de nouvelles discussions sur la fiabilité ainsi que l’origine des données utilisées par l’outil.
La diversité des applications se mesure au quotidien. Voici quelques exemples concrets, relevés directement sur le terrain :
- génération automatisée de rapports, assistance à la rédaction, aide à la programmation, support client, traduction instantanée, création de scénarios pédagogiques.
Adopté comme agent conversationnel, ChatGPT fluidifie les interactions entre entreprises et clients, tout en générant de nouveaux risques : circulation de données personnelles, approximations dans les réponses, stéréotypes importés, exploitation de contenus protégés sous droit d’auteur.
Désormais, le RGPD et la sécurisation des données prennent une place centrale dans la réflexion des acteurs du secteur. L’opacité persistante quant à la nature réelle des jeux de données inquiète les instances européennes : les informations sont-elles véritablement anonymisées ? Les sources peuvent-elles être retracées ? Le débat sur le droit d’auteur monte d’un cran, illustré notamment par la plainte du New York Times contre OpenAI autour de l’utilisation de son contenu. Face à la montée des tensions, un choix s’impose : bâtir la confiance, poser des garde-fous, à défaut de quoi la suspicion s’installe.
La course à l’intelligence artificielle ne connaît pas le moindre coup de frein. Mais tant que l’origine des données brillera par son imprécision, la confiance du public avancera elle aussi au compte-goutte.